La présidente de tous les Vendredis du Vin et de celui-ci en particulier est une vigneronne au prénom fleuri, et justement, elle nous invite à parler de fleurs et des notes florales du vin, sujet qu’elle trouve léger, mais comme Iris est loin d’être superficielle et légère, je ne lui parlerai pas (uniquement) de fleu-fleurs mais de chimie. Et parce que je ne suis pas une scientifique mais une littéraire, de la chimie je glisserai vers l’alchimie, celle qui se produit parfois entre un vin et soi, entre une région et soi, entre des fleurs et soi.
Qu’elles sont difficiles à identifier, ces notes florales dans le vin, bien moins évidentes que les notes fruitées ou les notes végétales ! Subtiles, évanescentes, parfois évidentes et intenses pour les cépages dits aromatiques comme ceux de la famille du muscat, ou de type alsacien comme le Gewürztraminer ou ibériques comme l’Alvarinho ou le Loureiro.
On atteint le paroxysme aromatique floral avec les cépages muscatés, dont les arômes libres sont représentés par des molécules de la classe des terpénols, les monoterpénols, que l’on trouve dans la partie solide des baies. Les monoterpénols les plus odorants sont le linalol, le nérol, le géraniol et le citronellol. LOL ! Tous ces "ols", c’est bien gentil, mais plus concrètement ? Concrètement, les monoterpénols sont à la base d’arômes de muguet mais aussi de rose, de citronnelle et tilleul. Ce sont ces notes que l’on retrouve dans les muscats, le Gewürztraminer, mais aussi le gamay pour les crus du Beaujolais, dont les arômes de muguet, violette et pivoine caractérisent le fameux Chiroubles (et aussi le Chénas à un stade de perception plus faible).
Bien sûr, c’eût été facile pour moi, compte-tenu de ce que je viens d’énoncer, de vous parler d’un muscat, qu’il soit de Lunel, de Beaumes de Venise ou d’ailleurs. Je préfère mettre en avant une appellation confidentielle dont j’ai parlé quand je suis allée dans le Vaucluse en juin, le Vacqueyras blanc, la cuvée Careless 2011 du Domaine Alain Ignace, par exemple.
Iris nous demande de réveiller notre mémoire olfactive ? Et bien quand je bois ce vin, je me souviens de l’acacia en fleurs qui embaumait le jardin de ma grand-mère, de l’aubépine que nous sentions lors de nos promenades sur les chemins dans l’Yonne, du chèvrefeuille au détour d’une rue d’un village du Vaucluse, des tilleuls de mon quartier en juin. Roussane, viognier et bourboulenc se sont alliés pour offrir cet odorant bouquet. Tiens, puisque je parle de fleurs, ma mémoire visuelle se réveille aussi et me fait repenser au magnifique et odorant genêt au pied des dentelles de Montmirail.
Un peu de zizique pour conclure ? On n’entend pas souvent de jazz dans les vidéos postées sur les blogs de mes confrères du vin, pour combler ce vide, "Petite Fleur" de Sidney Bechet est un clin d’œil à la thématique de ce VdV.